Le portrait d'un collègue #14
Portrait d’Élodie Reboul, archéothanatologue au service Archéologie Préventive
Rencontre avec Élodie Reboul, qui travaille au sein du service Archéologie Préventive en tant qu’archéothanatologue (ou anthropologue). Présentation de ce métier méconnu voire inconnu.
Parlez-nous de votre parcours.
J’ai quitté le Québec à dix-neuf ans pour réaliser une licence en archéologie à l’Université de Paris I. La particularité de ce cursus est la possibilité de suivre des cours d’archéologie dès la première année et d’avoir un choix de cours varié. Durant les vacances scolaires, j’ai participé à différents chantiers d’archéologie pendant lesquelles j’ai découvert le métier d’archéothanatologue. Cette spécialité se donnant à l’époque soit à Marseille soit à Bordeaux, je suis allée réaliser mon master à l’Université de Bordeaux I.
Comment êtes-vous arrivée à la Métropole ?
J’ai commencé ma vie professionnelle à la suite de ce master tout en continuant à participer à des chantiers d’archéologie qui m’ont permis, entre autres, d’agrandir mon réseau professionnel. Grâce à ce dernier, j’ai été informé de la création d’un nouveau poste lié à ma discipline au service d’archéologie préventive de l’Eurométropole, qui existe depuis 2007. J’ai donc été sélectionnée pour commencer en février 2021.
Comment est né le métier d’archéothanatologue ?
Le nom de mon métier est actuellement peu connu. D’une part parce que la discipline est assez récente. L’enregistrement archéologique d’une sépulture et l’identification des données biologiques d’un individu se sont développés au début des années 1990 pour donner suite à des questionnements interdisciplinaires. Ensuite, l’intitulé du métier a évolué plusieurs fois au cours de ces trente dernières années : d'anthropologue à anthropologue de terrain, puis archéoanthropologue, et enfin archéothanatologue. Désormais, les objets ne sont plus au centre de l’étude des sépultures, mais la reconnaissance de l’identité de l’individu ainsi que des pratiques funéraires sont les clés de la restitution du monde des morts.
En quoi consiste le métier d’archéothanatologue ?
La mission principale est de mener à bien l’ensemble des études concernant les restes osseux humains mis au jour dans le cadre d’opérations archéologiques préventives. Mes principales tâches sont d’une part d’enregistrer sur le terrain tous les indices laissés par le corps, et d’autre part, d’identifier l’identité du défunt.
Quelles sont les qualités pour faire ce métier ?
La curiosité intellectuelle et l’apprentissage en continu permettent d’avoir une meilleure appréhension du terrain et de recueillir les indices afin de comprendre les dépôts originels au sein d’une sépulture. Une rigueur méthodologique permet de réaliser une étude biologique fiable. Puis, un esprit de synthèse sert à croiser les données afin de restituer le monde des vivants à travers celui des morts.
Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?
Je réalise actuellement l’étude biologique de plus de cent individus provenant d’un cimetière mérovingien que nous avons mis au jour sur une opération archéologique effectuée en 2021 à Cattenom. Nous sommes au début des recherches, que nous avons présentées lors des journées européennes du Patrimoine (16-17 septembre 2023) au centre culturel de Cattenom. De nombreuses études complémentaires sont en cours, et nous espérons croiser les données pour réaliser un nouveau bilan l’année prochaine.
Qu’est-ce qui vous plait le plus dans votre quotidien ?
Malgré toutes les contraintes techniques et mécaniques de notre travail de terrain, qui sont omniprésentes et très difficiles, l’investigation in situ nous offre des découvertes qui dépassent souvent notre imaginaire. Une journée de travail est simplement unique. Nos activités débutent sur un chantier, en gilet orange, et se terminent par la valorisation de nos résultats soit pour la communauté scientifique soit pour le grand public. Cette dernière tâche me semble tellement primordiale, car nous fouillons pour restituer des histoires disparues à partir des traces laissées par nos prédécesseurs. Et donc, ces évènements historiques ne concernent pas uniquement les archéologues, mais ils s’adressent aussi à vous.
Dernière mise à jour : 11/10/2023